Gatien Lapointe
Ode au Saint-Laurent
précédé de J’appartiens à la terre, édition établie par Jacques Paquin
Montréal, PUM, coll.
« Bibliothèque du nouveau monde », 2024, 248 p., 39,95 $.
Faire dos à l’Amérique? Jamais.
L’édition critique d’œuvres littéraires a des exigences de haut niveau, car elle s’adresse à un lectorat intéressé par la littérarité de certaines œuvres, telle l’évolution d’un livre ou de tous les textes constituant l’œuvre d’une ou d’un écrivain. Au Québec, c’est l’écrivain et universitaire Jean-Louis Major qui fondit la « Bibliothèque du Nouveau Monde » en 1986. Aujourd’hui la collection « bnm poursuit la mission de cette prestigieuse collection. Comme sa grande sœur, elle rassemble les textes fondamentaux de la littérature québécoise en des éditions critiques qui visent à assurer l'authenticité des œuvres et leur lisibilité. »
Parmi les ouvrages parus, je
pense à l’intégrale des œuvres d’Anne Hébert – 5 volumes sous la direction de
Nathalie Watteyne – et, récemment, celle de Jacques Brault – 4 volumes sous la
direction de Jacques Brault et François Dumont.
Laissons Jacques Paquin présenter
son projet : « Gatien Lapointe (1931-1983) fait partie des grandes
figures de la poésie au Québec. La parution du recueil Ode au Saint-Laurent,
précédée de J’appartiens à la terre, en 1963, est un événement qui est
resté marquant sur la scène littéraire. Non seulement le recueil a-t-il reçu
tous les honneurs, mais la réception critique a été unanime sur les qualités de
cette œuvre poétique qui s’inscrivait dans la thématique du pays, en
particulier grâce au long poème qui célèbre le fleuve québécois. Le recueil est
aussi remarquable parce qu’il fait partie des rares ouvrages à succès de la
poésie québécoise, atteignant un tirage de plus de dix mille lors de sa
dernière réimpression en 1969.
Les recherches qui ont abouti à
cette édition critique remontent au début des années 2000. J’ai appris, de la
part d’Armand Guilmette, ancien collègue et ami proche de Gatien Lapointe, que
les héritiers avaient déposé les archives personnelles du poète au Musée
québécois de culture populaire, à Trois-Rivières, dénommé aujourd’hui Musée
Pop. C’est dans l’entrepôt du musée que j’ai pu découvrir la richesse des
archives qui avaient été conservées. Mais ce n’est que plus tard, après avoir
publié le journal intime – Gatien Lapointe : Journal 1950-1956
(PUL, 2020) – et une anthologie de poèmes de Lapointe – Poèmes retrouvés (Écrits des forges, 2016) Poèmes retrouvés (Écrits des forges, 2016), que j’ai commencé à
déterminer l’ordre séquentiel des états rédactionnels du poème « Ode au
Saint-Laurent ».
Deux ans plus tard, j’étais en mesure de partager les fruits de mon travail. Cette publication est l’aboutissement de recherches qui m’ont permis d’identifier les divers manuscrits de tous les poèmes du recueil. Le dépouillement des textes publiés dans les périodiques ainsi que dans les anthologies est venu compléter l’étude comparative dont les résultats sont consignés dans les notes et relevés des variantes, accessible gratuitement sur le site Internet des Presses de l’Université de Montréal.
Le cœur de cet ouvrage est la
reproduction des poèmes de l’édition de 1966, qui sont accompagnés de notes
visant divers objectifs : signaler la version d’un poème publiée dans un
périodique, attirer l’attention sur un élément significatif de la poétique du
recueil, sur une allusion littéraire ou artistique, fournir la référence des
citations, enfin divulguer des informations sur l’identité des dédicataires.
Pendant la période d’écriture de l’Ode, et même à l’aube des années
1970, Lapointe a rédigé des poèmes qui sont restés inédits ou qu’il n’a pas
retenus pour les rendre publics. Il nourrissait également le projet de faire
paraître des poèmes qu’il aurait regroupés sous le titre « L’homme en
marche », et qu’on retrouvera placés après ceux de l’édition de 1966. À la
suite, on pourra lire la série d’inédits qui sont restés à l’écart de l’Ode,
mais qui offrent une évidente parenté avec les poèmes du recueil, soit parce
qu’ils ont été écrits durant la même période, soit qu’ils partagent une poétique
commune. Enfin, une dernière section rassemble trois témoignages précieux du
poète sur le contexte de rédaction de son recueil.
Si Lapointe se livrait volontiers
dans les entrevues qu’il accordait aux médias, une bonne partie de son parcours
personnel et professionnel est néanmoins restée dans l’ombre. La consultation
de sa correspondance, de son journal personnel ainsi que des curriculums vitae
qu’il soumettait périodiquement à son université a permis d’éclairer plusieurs
aspects méconnus de sa vie et dont rend compte la « Chronologie ».
Aucun commentaire:
Publier un commentaire