Claude Lévesque
British blues : fractures, grandeurs et misères d’un
royaume désuni
Montréal, Somme toute, 2021, 24,95 $.
Sortir ou non de la CEE
L’Angleterre m’a toujours fasciné par sa langue et sa culture, même à l’époque de mon militantisme pour un Québec indépendant. Je n’ai d’ailleurs jamais pensé que l’un et l’autre s’opposaient, c’est pourquoi j’ai choisi de faire mes études universitaires à l’Université de Montréal et à McGill. Ces raisons ont suffi pour attirer mon attention sur l’essai de Claude Lévesque, British blues : fractures, grandeurs et misères d’un royaume désuni.
Longtemps journaliste au Devoir, chargé des actualités internationales, l’auteur a profité de sa retraite pour suivre de près un événement politico-économique parmi les plus marquants des dernières années : le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne suite au bien nommé référendum Brexit.
Qu’est-ce que le Royaume-Uni,
direz-vous? Jadis appelé Albion, il s’agit de l’union de quatre pays : l’Angleterre
(capitale : Londres), l’Écosse (capitale : Édimbourg), le
Pays de Galles (capitale : Cardiff) et l’Irlande du Nord
(capitale : Belfast). Il ne faut surtout pas confondre Royaume-Uni et Grande-Bretagne,
car l’Irlande du Nord ne fait pas partie de la G.-B.
Venons-en à British blues.
Rappelons-nous d’abord que le Royaume-Uni a joint la Communauté économique
européenne en 1973, une organisation créée en 1957 pour « mener une
intégration économique (dont le marché commun) entre l’Allemagne de l’Ouest, la
Belgique, la France, l’Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas. » D’autres
traités ont suivi celui de la CEE pour en modifier divers aspects, notamment en
élargissant la géopolitique de l’Europe « moderne », dont celui de Maastricht
qui a établi l’Union européenne en 1993.
Pourquoi le Royaume-Uni a-t-il attendu
16 ans avant de joindre la CEE? « Les Britanniques sont réputés pour leur
décontraction, mais aussi pour leur sens de la discipline. On reconnait leur
progressisme, mais on s’étonne des privilèges dont jouit encore leur aristocratie.
On les trouve polis, puis on se confronte à la grossièreté des supporters de
certaines équipes sportives. Les contradictions et les fractures semblent ainsi
s’inscrire aux fondements de cette nation qui, il n’y a pas très longtemps,
régentait la moitié du monde. »
Or, ces traditions n’ont rien perdu
de leurs empreintes historiques en se joignant à la CEE, notamment en refusant l’euro
comme monnaie commune et en conservant la livre sterling. Par contre, le Royaume-Uni
s’est rapproché physiquement de la France grâce au Tunnel sous la Manche, long
de 50,5 kilomètres, dont la construction a été entreprise en 1987 et complétée en
1993-1994. C’est par ce tunnel que transitent les marchandises, le train
Eurostar de type TGV et, en ces temps de migration, celles et ceux qui risquent
leur vie pour se rendre en Angleterre, pays qui, espèrent-ils, les accueillera.
Pour avoir séjourné à Douvres, à proximité de la sortie anglaise du tunnel, je
vous assure que la circulation routière est lourde et constante jour et nuit.
De retour à British blues,
on apprend que, « depuis des années, Claude Lévesque souhaitait en
apprendre plus sur cette "perfide Albion" que l’on connaît mal et que
bien des gens préfèrent ignorer; sur ces "Anglais" dont on ridiculise
la cuisine alors qu’on s’en inspire abondamment. Le Brexit a hâté sa décision :
entre 2018 et 2019, il a séjourné plusieurs mois à travers le pays. Dans ce
livre, il brosse le portrait d’une nation à la fois déchirée et résiliente,
festive et impassible, accueillante et nationaliste. » Il suffit de passer
en revue la table des matières de l’essai pour constater que le titre de chacun
des quinze chapitres qui le composent trace clairement la route sur laquelle Claude
Gravel nous sert de guide avisé, le Brexit servant de boussole qui oriente son périple
qui devient ainsi le nôtre. Sa plume de journaliste aguerri, associée à son
talent de conteur vulgarisateur, fait de son livre un récit de voyage dans l’univers
passé, présent et à venir de la Grande-Bretagne.
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