mercredi 5 mai 2021

Bernard Pozier (dir.)

Écrits des forges : 50 ans de poésie 1971-2021, anthologie

Trois-Rivières, Écrits des forges, 2021, 262 p., 22 $.

Toujours jeune à 50 ans

Les années 1960 à 1970 furent marquantes pour le milieu de l’édition québécoise, car plusieurs nouvelles maisons ont été créées pour répondre au besoin urgent de publier la pléthore de jeunes autrices et auteurs. Parmi ces nouvelles adresses, il y eut les Écrits des Forges fondés en 1971 par Gatien Lapointe, poète et professeur de création littéraire à l’UQTR, avec quelques-uns de ses étudiants.

Aujourd’hui, Bernard Pozier dirige la maison trifluvienne dont il fut longtemps directeur littéraire. Écrivain et retraité de l’enseignement collégial, il connaît mieux que quiconque l’importance des anthologies qui permettent d’explorer de nouvelles avenues littéraires, de découvrir de nouveaux talents jusqu’à vouloir pousser plus loin le plaisir d’entendre leur voix.



Louise Blouin et Pozier publient ainsi Poètes des Écrits de Forges (Bibliothèque québécoise, coll. « Petite anthologie de la poésie québécoise », 2003) et Espace Québec, 65 poètes québécois (Écrits des Forges  / Le Castor Astral, 2005). Puis, Pozier publie, en compagnie de Josyane De Jesus-Bergey, Québec 2008 : 40 poètes du Québec et de France (Écrits des Forges / Sac à mots, 2008).

Mettant à profit son expérience d’éditeur et de passionné de poésie, Bernard Pozier a préparé une nouvelle anthologie : Écrits des Forges : 50 ans de poésie 1971-2021 (Écrits des Forges, 2021). Cet important recueil « dresse un portrait vivant du travail d’édition qui a été entrepris en 1971 par Gatien Lapointe ». L’anthologiste souligne dans la préface : « À l’origine, la maison publiait de deux à quatre ouvrages par an, un peu sous l’enseigne : les étudiants de Gatien Lapointe. Aujourd’hui, un demi-siècle plus tard, les Écrits des Forges sont devenus une maison d’édition internationale de poésie, publiant chaque année environ une vingtaine de livres dont certains en coédition avec des éditeurs de divers pays… Insistant sur l’importance de l’aspect multigénérationnel du catalogue de la maison et sur l’ouverture à toutes les formes de la poésie pratiquée par les poètes de chaque génération, Bernard Pozier précise : "Sur le plan éditorial, la maison a toujours tenu à cette idée de la poésie ouverte, capable d’accueillir de multiples formes, de forger des voies et des voix à l’infini, au-delà des générations, des lieux et des époques." »

Ce « florilège de poètes qui, depuis les tout débuts, ont publié au moins un livre de leur vivant aux Écrits des Forges » compte 101 poètes québécois, 30 poètes français, 40 poètes mexicains ainsi que 45 poètes de divers horizons dont Zachary Richard, Serge Patrice Thibodeau, Gérald Leblanc, Herménégilde Chiasson et même Lawrence Ferlinghetti, poète de la « Beat generation » décédé en février dernier.

Un seul texte de chacun de ces 216 écrivaines et écrivains appartenant à diverses époques des Écrits des Forges, mais aussi, sinon surtout, à différentes générations dont on peut apprécier la diversité du discours poétique. Entre Rina Lasnier qui, oui, publia à cette enseigne, et Yves Boisvert ou Claude Beausoleil, il y a un monde tant dans la thématique que dans le tissu poétique. Autres temps, autres mœurs : certes, mais surtout un horizon qui s’élargit entre autres en s’interrogeant sur la société où vivent les plus jeunes – il y a 20 ou 50 ans, par exemple – et qu’ils veulent à leur image coûte que coûte.

Jacques Paquin note avec justesse, dans la préface de Poètes des Écrits de Forges (Bq, op.cit)), que « contrairement aux autres grandes maisons de poésie comme l’Hexagone, Les Herbes rouges ou même le Noroît (fondé comme les Écrits des Forges en 1971), il est à première vue plus difficile de cerner la spécificité littéraire des Écrits des Forges. » C’est en lisant tout doucement Écrits des Forges : 50 ans de poésie 1971-2021 que la singularité de l’éditeur trifluvien s’affirme : non seulement les autrices et auteurs québécois assument leur personnalité littéraire, mais celles et ceux venus d’autres univers, francophones ou non, s’inscrivent parfaitement dans l’unicité qui tourbillonne dans leur diversité.

Je fais mienne la conclusion du professeur Paquin qui convient tout à fait à la nouvelle anthologie : « Ce qui frappe à la lecture de cette anthologie, comme d’ailleurs du catalogue entier des Forges, c’est la variété des voix, jamais assujetties à une tradition, à une école ou à un consensus dicté par l’institution littéraire. Elle rend compte de cette diversité en présentant une sélection de poèmes qui témoigne de l’esprit de jeunesse qui anime encore et toujours les Écrits des Forges. » (14)

 

Vanessa Bell et Catherine Cormier-Larose (dir.),

Anthologie de la poésie actuelle des femmes au Québec, 2000-2020

Montréal, Remue-Ménage, 2021, 288 p., 24,95 $.

Quand la poésie s’exprime au féminin


En 1991, Anthologie de la poésie des femmes au Québec : des origines à nos jours, sous la direction de Nicole Brossard et Lisette Girouard parut aux Éditions du remue-ménage; c’était le premier ouvrage du genre entièrement consacré aux poètes québécoises, réunissant initialement 183 d’entre elles. 30 ans plus tard, Vanessa Bell et Catherine Cormier-Larose considèrent leur travail comme une suite à cet ouvrage. Ce livre poursuit donc « le travail d’historicisation de la poésie des femmes en actualisant ce répertoire qui ne cesse d’augmenter et de gagner en popularité. [L’ouvrage] présente le travail de cinquante-cinq poètes qui incarnent les mouvances de la poésie québécoise actuelle [c’est-à-dire des vingt dernières années]. Outil de référence, ce livre propose de découvrir et de célébrer, dans une approche intersectionnelle et intergénérationnelle, une sélection d’œuvres frondeuses d’un milieu en pleine effervescence. » N’oublions pas qu’une collection de cette envergure illustre un vaste pan d’un écosystème littéraire qu’il faut protéger.

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