Simon Paradis
Reine de miel
Montréal, Marchand de feuilles, 2018, 352 p., 27,95 $.
Sucré. Salé.
Aigre-doux.
Je me suis souvent senti
spectateur devant Reine de miel,
premier roman de Simon Paradis semblable à de la haute voltige d’une narration
fragile suspendue au-dessus du temps et de l’espace, avec pour toile de fond la
science de l’apiculture ancestrale, réelle ou imaginée
Le roman s’annonce d’abord comme
une enquête policière après qu’un inconnu fut retrouvé au fond d’une cuve de
miel de l’entreprise des Paradis, apiculteurs depuis le 19e. Double
mystère puisque Vincent, septième de la génération, est aux abonnés absents. Ne
sautons pas trop vite aux conclusions, car il faut connaître et comprendre les
origines de cet engagement familial et les faits saillants d’une aventure dont
la trame se confond avec celle de l’apiculture au Québec, en Amérique du Nord
et même en Europe.
Le romancier a raconté, en
entrevue, que l’histoire de sa propre famille l’a inspiré et qu’il en a fait
une très large fresque. Au cœur de ce récit, la « reine de miel »,
une espèce que des apiculteurs du Canada et des États-Unis ont mis temps et
argent à développer pour remplacer la reine autochtone incapable de survivre
aux rigueurs de l’hiver.
Cette quête sera parsemée d’embûches
tant du côté humain que de la part de l’insecte qu’on dit social. Pour bien
comprendre les enjeux, l’auteur projette sur quatre écrans – Québec, É.-U.,
Mexique et France – le déroulement d’intrigues complémentaires. Mais, il y a d’abord
la famille Paradis, son apprentissage de l’apiculture, sa volonté d’implanter
cet élevage qui n’est encore qu’une activité parmi les tâches annuelles des
agriculteurs, d’en susciter l’intérêt et de suivre l’évolution de la production
du miel.
Dire que Reine de miel a des aspects d’un « Apiculture pour les nuls »
ou de « Miel 101 » est un euphémisme. Je pense ici au lexique
descriptif des variétés de miel selon le terroir des ruches – climat, sol,
végétation, etc. – qui évoque une science presque aussi rigoureuse que celle de
l’œnologie. Que dire de la rencontre d’apiculteurs, tenue lors de l’Exposition
universelle de Paris en 1878, à laquelle participèrent, entre autres, un
certain Thomas Valiquet, le maître Celso et Charles Dadant, sinon qu’elle
marqua l’entrée dans la modernité de l’apiculture et de la production du miel.
Simon Paradis a le talent d’un
conteur, sans toujours distinguer l’essentiel du superflu, semant la confusion
entre les lieux, les époques, les personnages et même les péripéties de ce qui
est tantôt une histoire de famille, tantôt celle de 100 ans d’évolution de
l’apiculture. Sans oublier de relater comment on devient l’héritier d’un art
hissé au rang d’une science et d’expliquer l’ultime test confirmant qu’on est véritable
apiculteur.
Je ne saurais reprocher à Simon
Paradis la qualité de la langue du roman, que du contraire. S’il faut avoir un
dictionnaire sous la main, comme cela va de soi quand on lit, pour bien
comprendre quelques mots du langage de l’apiculture, il faut aussi faire diligence
à l’emploi parfois abusif de métaphores et d’autres figures. Certes, la
périphrase est utile, entre autres, pour éviter les répétitions, mais cela peut
parfois peser lourd sur le discours narratif.
Toujours du côté de l’écriture,
le romancier réussit à partager la dimension émotive de l’apiculture en mettant
en évidence les liens qui unissent l’éleveur et les abeilles, surtout ceux
qu’il tisse avec la reine qui vont bien au-delà de la domestication d’un chien
ou d’un chat. C’est d’ailleurs, selon moi, un des aspects les plus marquants du
livre.
Partager un univers dont le miel est l’or liquide
n’est pas une mince affaire. Il ne faut surtout pas que cela édulcore la saveur
aigre-douce propre aux aléas d’un long roman comme celui de Simon Paradis. Et,
ma foi, l’auteur y est parvenu avec brio.
Bravo pour votre critique. J'ai été incapable d'aller jusqu'au bout, ça m'a profondément ennuyée à cause de la confusion, comme vous l'écrivez.
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