Sophie Bertrand et Jocelyne
Fournel (dir.)
Agence Stock : une
histoire du photojournalisme au Québec
les éditions du passage, 2024,
200 p., 54,95 $.
L’image vaut toujours 1000 mots
La majorité des grandes revues de la presse internationale – Time, Life, Look, Paris Match, National Geographic Magazine, etc. – ont fait partie de mon éducation dès ma plus tendre enfance, dans les années 1950. Ces périodiques ont fait mon éducation à la géopolitique, aux grands événements sociaux ou scientifiques à l’échelle planétaire, le cerveau d’un enfant étant comme une éponge. Ils m’ont fait voyager sur tous les continents grâce aux photoreportages du français Henri Cartier-Bresson (1908-2004) qui affectionnait les photographies de rue, les aspects pittoresques et signifiants de la vie quotidienne. Il y eut aussi les œuvres du photographe humaniste français, Robert Doisneau (1912-1994).
Depuis mon arrivée à l’hebdo du
Haut-Richelieu, Le Canada français, en 1979, j’ai connu de véritables artisans
du photojournalisme : Ken Wallet, Jacques Paul, Rémi Boily, Jessica
Viens-Gaboriau, sans oublier de nombreux pigistes.
Les éditions du passage
soulignent cette année 25 ans de recueils de poésie et de beaux livres. À mon
avis, tous les livres parus à cette enseigne sont des beaux livres : la
poésie sur papier crème et petit fil rouge en bordure ou les autres ouvrages dont
le travail d’édition et d’impression ne cesse d’être remarqué, parce que tout à
fait remarquables. Parmi les premiers ouvrages célébrant l’anniversaire de la
maison d’édition, il y a Agence Stock : une histoire du
photojournalisme au Québec, écrit sous la direction de Sophie Bertrand et
Jocelyne Fournel.
En introduction, Mme Bertrand raconte :
« En 1987, trois jeunes photographes décident de fonder une agence de
photographies. À l’instar des agences de presse européennes, canadiennes ou
américaines, Robert Fréchette, Jean-François LeBlanc et Martin Roy souhaitent
créer une structure indépendante inédite au Québec. Dès la fin des années 1980,
l’Agence Stock Photo s’inscrit dans le paysage photographique et établit des
collaborations régulières avec la presse nationale et internationale. Pendant
plus de trente ans, Stock va accueillir de nouveaux photographes, chacun venant
y partager son expérience et sa vision singulière de la photographie
documentaire. Au total, quatorze photographes – Oscar Aguirre, Benoit Aquin,
Josué Bertolino, Normand Blouin, Robert Fréchette, Laurent Guérin, Caroline
Hayeur, Jean-François LeBlanc, Michel Legault, Horacio Paone, Martin Roy,
Jean-Eudes Schurr, Marie-Hélène Tremblay, et moi-même – ont été, à différents
moments et pendant une durée variable, membres du regroupement. Rassemblés par
une démarche commune à caractère social, ils·et elles ont apporté une diversité
de regards sur des enjeux sociopolitiques, sur la culture locale, tout en
couvrant des événements majeurs qui ont façonné la société québécoise des
années 1990 à nos jours.
Quoique plusieurs de leurs images
aient fait l’objet de publications monographiques, d’expositions d’envergure
(Rencontres d’Arles, Rencontres photographiques de Gaspésie, Mois de la Photo à
Montréal, entre autres) ou individuelles, sans compter les nombreuses parutions
dans les médias, aucun ouvrage à ce jour n’a été consacré au collectif. Afin de
remédier à ce manque dans l’histoire de la photographie québécoise, nous avons
souhaité faire rayonner celle de l’Agence Stock Photo tout en suivant, en filigrane,
une trame d’événements qui ont ponctué le Québec de 1987 à 2017. Pour ce faire,
seules les photographies prises en territoire québécois ont été sélectionnées.
Après une recherche approfondie dans les archives respectives des photographes,
nous avons extrait, parmi des milliers d’images, celles qui nous semblaient
posséder une valeur patrimoniale, tant des images iconiques ayant marqué la
mémoire collective du Québec, que des images inédites présentant différentes
cultures et traditions québécoises ou, plus simplement, des moments du
quotidien.
Ce livre n’est pas révélateur de
la vaste production photographique de ses auteur-e-s et ne prétend pas donner à
voir toutes les richesses culturelles et territoriales de la province.
L’ambition de cet ouvrage est plutôt d’inscrire de façon pérenne un pan de la
photographie québécoise et de souligner l’apport notable de l’Agence Stock
Photo dans ce domaine, autant que les écritures photographiques singulières des
membres qui en ont fait partie successivement.
Le photojournalisme et la
photographie documentaire représentent un instant contextualisé de nos
sociétés. Les images nous permettent de nous rappeler, de nous questionner, et
forment un patrimoine qui nous aide quelques fois à prendre conscience d’enjeux
sociétaux, politiques ou environnementaux. Elles sont, de fait, subjectives et
suscitent des polémiques ou provoquent des débats, elles nous informent ou nous
désinforment parfois, comme elles peuvent, également, nous diviser ou nous
rassembler autour d’une mémoire collective. Par cet objet du livre, nous vous
invitons maintenant à voir ou à revoir les images des photographes qui ont fait
l’histoire de l’Agence Stock Photo, et dont la somme des photographies réunies
dans cet ouvrage constitue une richesse artistique, historique et sociologique,
un véritable héritage commun. »
Plus de 100 photographies
documentaires en noir et blanc et en couleur composent cet ouvrage selon de
grandes thématiques : Référendum sur la souveraineté du Québec (1995);
Résistance de Kanehsatà:ke (ou crise d’Oka, 1990); Sommet des Amériques à
Québec (2011); Printemps érable (2011); Montréal, la nuit; et La chasse et la
pêche.
Outre l’introduction de Sophie
Bertrand, l’ouvrage comprend trois essais brefs : « Zone de turbulences,
tracé d’une agence soumise à des vents contraires » de l’historien de la
photographie Vincent Lavoie, ainsi que deux conversations, l’une avec Jean-François
LeBlanc et l’autre avec Caroline Hayeur. Ces échanges, sous forme d’entrevue,
nous font suivre la démarche de M. LeBlanc et celle de Mme Hayeur, tant comme
photographe que participant au projet Agence Stock photo, et où en est leur
parcours professionnel.
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