mercredi 21 octobre 2020

Pierre Hébert, Bernard Andrès et Alex Gagnon (dir.)

Atlas littéraire du Québec

Montréal, Fides, 2020, 512 p., 59,95 $.

 

Sur les routes de notre littérature

 

La parution de l’Atlas littéraire du Québec a retenu mon attention, curieux de découvrir le fruit d’une vaste recherche dirigée par Pierre Hébert, Bernard Andrès et Alex Gagnon. Bien que Fides a jadis publié des ouvrages aussi importants qu’Histoire de l’édition littéraire au Québec au XXe siècle (1999, 2004 et 2010), trois forts volumes écrits sous la direction de Jacques Michon, et l’incontournable Dictionnaire des auteurs de langue française en Amérique du Nord (1989) de Hamel, Hare et Wyczynski, j’étais surpris que la maison se soit lancée dans une telle aventure en 2020.



 


J’ai d’abord voulu comprendre le sens du mot "atlas" dans le cadre de recherches littéraires. S’il évoque, de prime abord, une notion de géographie, un "atlas" peut aussi être « un ouvrage de référence sur un sujet comportant des cartes, des schémas ou des diagrammes ». Je comprends donc qu’il fait ici référence à l’idée de schémas, l’ouvrage comportant de nombreuses insertions complémentaires aux divers sujets discutés, tels des citations ou des illustrations complétant le propos.

Quel était l’objectif de l’équipe éditoriale et quelle méthodologie organisationnelle a été retenue? En présentation, on dit que le « premier but de cet Atlas est à la fois de faire découvrir les multiples aspects de la littérature québécoise, grâce à la lecture de notices variées, et de la faire voir, en quelque sorte, par de nombreuses illustrations et encadrés. » Plus loin, on ajoute : « nous offrons à notre façon une cartographie des lieux de production et de diffusion, des époques, mais aussi des liens entre gens de lettres, sociétés et institutions naissantes, puis confirmées. »

L’abondante matière a été divisée en trois grandes parties, chacune fractionnée en 10 chapitres. La première partie, intitulée « Histoire », compte quatre chapitres : de la Nouvelle-France à 1800; le XIXe siècle; le XXe siècle (1900-1960); et le XXe et XXIe siècles (1960 à nos jours). La seconde partie, « Traversée », compte trois chapitres : littératures, vie littéraire; figures et thématiques. Quant à la dernière partie, « Genres et marges », elle se développe aussi en trois chapitres : régimes d’écriture, multimédiatisation, livres et art.

Une précision s’impose : les chapitres de la première partie du livre, la plus importante, sont eux-mêmes divisés en trois sections : capsules, auteurs et œuvres. J’insiste sur l’importance de chacune des 253 capsules, car elles font la synthèse d’une époque, d’une école littéraire, d’un auteur, d’une œuvre, etc. À cet appareil qui peut sembler complexe, s’ajoutent divers liens croisés d’un sujet à un autre ou à plusieurs autres. Cela sans oublier un index des noms, un index des œuvres, ainsi qu’une table des matières détaillée.

L’équipe éditoriale a pu compter sur la collaboration de 158 littéraires, professeurs, chercheurs, journalistes ou chroniqueurs. Dans bien des cas, j’ai constaté qu’on a fait appel aux spécialistes de certains sujets, par exemple la notice concernant l’écrivaine Anne Hébert a été confiée à Nathalie Watteyne, celle sur VLB à Jacques Pelletier, celle sur le polar à Norbert Spehner ou celle sur la nouvelle littéraire à Michel Lord.

J’ai longtemps compulsé Atlas littéraire du Québec pour me familiariser avec sa méthodologie organisationnelle et son mode de références croisées qui tiennent de la vastitude. Durant cet exercice d’appropriation, je me suis souvent demandé qui étaient les lecteurs cibles de cet ouvrage de référence. J’ai conclu que quiconque s’intéresse à littérature québécoise y trouvera son compte dans les capsules ou notices, dans les nombreuses citations ou même parmi les illustrations dont certaines proposent des artéfacts qui en complètent l’histoire.

Enfin, un tel ouvrage exige des choix éditoriaux, certains discutables autant parmi ceux des informations retenues que celles oubliées. Est-ce que ces sélections invalident la valeur intrinsèque de l’histoire de la littérature québécoise proposée? Je ne crois pas, même s’il y a des oublis notables – par exemple, l’importance de Jean Royer comme passeur littéraire – ou quelques erreurs – par exemple, Rina Lasnier n’est pas décédée à Joliette, mais à Saint-Jean-sur-Richelieu –. La valeur globale du livre est sauve comme d’autres de ses semblables.

En revenant fréquemment à l’Atlas littéraire du Québec, une question est restée insistante : l’ouvrage est-il une valeur ajoutée à notre patrimoine littéraire? Qui s’y plongera ou y fera référence outre d’autres spécialistes des lettres québécoises? Une édition numérique n’aurait-elle pas suffi? Si je reconnais une valeur, toute relative soit-elle, à cet ouvrage, j’y reviendrai probablement à l’occasion pour confirmer ou infirmer une ou des informations, sinon pour relire des commentaires critiques.

Je me suis souvenu d’une expérience pédagogique : à la parution de La littérature québécoise (Typo, 1997) de Laurent Mailhot, j’ai mis cet essai à l’étude dans un cours portant sur notre littérature. Ce fut une grossière erreur de ma part, car sa lecture exigeait un minimum de connaissances déjà trop vastes. Cette constatation s’applique, à mon avis, sur l’Atlas littéraire du Québec.

1 commentaire:

  1. Dieu sait pourquoi, mais j’affectionne les livres d’histoire de notre littérature et j’en accumule déjà plusieurs. Chacune se décline selon l’intention de leur auteur, offrant ainsi divers points de vue selon l’époque où elle a été publiée ou celui de cet auteur. Est-il en-core pertinent au 21e siècle de publier une version papier de tels ouvrages? Je n’ai honnê-tement pas de réponse à cette interrogation tellement toutes les recherches, quel qu’en soit le domaine, paraissent d’abord sur Internet, question de coût, mais surtout demande des bibliothèques freinant la boulimie gargantuesque de leurs rayons de livres. Néanmoins, j’attire votre attention sur l’Atlas littéraire du Québec (Fides), fruit d’un imposant chantier dirigé par Pierre Hébert, Bernard Andrès et Alex Gagnon.

    RépondreEffacer