Aurélie Campana
L’impasse
terroriste : violence et extrémisme au XXIe siècle
Montréal, MultiMondes, 2018, 144 p., 22,95 $ (papier),
16,99 $ (numérique).
Du terrorisme des uns
à celui des autres
Est-il possible qu’un trop-plein
d’informations nous distraie de contenus qui méritent d’être pris au sérieux
contrairement aux balivernes éphémères? Mais, il y a des limites à voir des
atrocités commises au nom de la foi ou de la sécurité nationale. Avouons qu’il
n’est pas simple de comprendre le terrorisme, souvent banalisé par des
jugements approximatifs, aussi haineux que l’inquiétude qui les provoque. Or, voulant
aller au-delà des infos en rafale, j’ai lu l’essai d’Aurélie Campana,
professeur titulaire de science politique à l’Université Laval de Québec, intitulé
L’impasse terroriste: violence et extrémisme
au XXIe siècle.
« Terrorisme » a de multiples
significations, selon le point de vue d’où on l’aborde. Il n’est pas une
affaire de sémantique, mais de jugements sociopolitiques posés sur des actions
réelles, légales ou non. Ainsi, les pays soumis à une dictature ont recours à
un « ensemble des mesures arbitraires et violentes qui visent à imposer un
pouvoir sur une population ». Cela s’avère depuis la Révolution française du
18e siècle.
La terreur politique actuelle a
pris la forme d’associations d’individus épousant une cause commune visant à
imposer sa loi à l’ensemble d’une ou de plusieurs populations. On pense, entre
autres, à Al-Qaida et au 11 septembre 2001, et à l’organisation « État islamique »
(Daech) qui a provoqué « une guerre globale contre le terrorisme ».
Ce faisant, on a employé un modèle de guerre traditionnelle sans remettre en
question son efficacité. Hélas, une « telle approche contribue à
dépolitiser en partie cet ennemi que l’on présente avant tout sous couvert
religieux, nourrissant des stéréotypes et créant des amalgames entre islamisme,
djihadisme, islam et violence. »
« Une lutte impossible? »,
de demander l’essayiste. Elle poursuit en analysant, puis en expliquant pourquoi
« le risque zéro n’existe pas ». À son avis, Al-Qaida est considérée
comme le modèle d’organisation terroriste du 21e siècle. Il a été exporté,
puis adapté à diverses causes défendues par des militants ou des activistes qui
ont imposé leurs lois à une majorité allant parfois jusqu’à la convertir à leur
point de vue.
Cette « pollution »
idéologique et ses moyens d’action d’une extrême violence ont même intoxiqué
des individus qui sont passés au terrorisme sans conviction, prétextant un engagement,
même inexistant. Ces personnes sont parfois appelées des « loups
solitaires ».
Avec le « Web, interface
entre le réel et le virtuel », l’auteure met en perspective ce qui semble
être la mondialisation du terrorisme par plates-formes interposées. Si les
médias traditionnels sont toujours un moyen de semer la terreur grâce aux bulletins
de nouvelles en continu, Internet est le support de diffusion préféré d’un
groupe comme Daech qui y investit temps et argent pour répandre sa propagande.
Faut-il imposer un contrôle des contenus diffusés sur la toile pour autant?
Non, car cela va à l’encontre de la liberté d’expression, surtout que ces
groupes terroristes savent contourner les portes closes.
Le terrorisme, ne l’oublions pas,
vient d’insatisfactions d’une frange de la population. C’est en cela que les
extrémismes de droite ou de gauche se rejoignent, parfois même dans l’action.
Le chômage, réel ou intellectuel, qui perdure devient un vide, un mal-vivre
inguérissable.
L’impasse terroriste : violence et extrémisme au XXIe siècle
étudie, analyse et aide à comprendre les enjeux et les actions du terrorisme
actuel. Il n’y a pas un seul terrorisme, mais plusieurs, tant dans leurs
fondements que dans les moyens d’exprimer leurs revendications. Si on s’insurge
devant l’assassinat d’écoliers, on semble impuissant devant le terrorisme larvé
de la puissante NRA. À se demander si le terrorisme des uns n’engendre pas le
terrorisme des autres.
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