jeudi 22 juin 2017

Max Férandon
Hors saison
Québec, Alto, 2017, 168 p., 20,95 $ (papier), 13,99 $.

Un peu, beaucoup, à la folie

Le romancier Max Férandon, après Monsieur Ho (2008) et Un lundi sans bruit, nous propose Hors saison, toujours chez Alto, la maison phare d’Antoine Tanguay installée dans la Capitale nationale.
Après un séjour en Chine, puis à Saint-Priest-la-Brume, un « petit coin de Creuse, un mirage suspendu, une miette de l’Hexagone », l’auteur installe une ribambelle de personnages en plein cœur de Québec et leur fait vivre une succession de péripéties qui m’ont semblé être de l’ordre du polar culinaire, nouveau genre s’il en est.




Rien de fade au goût d’Antoine Paradis, chef réputé devenu végétarien et conseiller culinaire auprès de diverses sociétés, dont des lignes aériennes qui souhaitent attirer la clientèle avec une valeur ajoutée à leur menu en vol. Paradis a bonne réputation dans le milieu, hormis pour Boilard, le redoutable critique culinaire qui a souvent assassiné ses plats.
Le chef connaît tout du quartier où il habite, et tous connaissent le maître queux dans ce microcosme de société avec restos, estaminets, librairie, caisse pop et même « Au Bonheur de Noël », une boutique célébrant le commerce qu’engendre cette fête l’année durant. Un matin, l’étalagiste Laurie-Ann fait une macabre découverte : Jacques Jodoin, le préposé à l’entretien, git sur le plancher de la boutique. Policiers et ambulanciers s’amènent, constatent le décès du pauvre homme et nous lancent dans l’enquête qui va être menée jusqu’à la fin du roman.
Marina Duhaime, la chef aux enquêtes spéciales, et son adjoint Bienville héritent du dossier. Outre Laurie-Ann, l’inspectrice doit interroger le propriétaire, le comptable et le personnel d’« Au Bonheur de Noël » pour connaître leurs occupations au cours des dernières heures, mais aussi pour évaluer leur façon de voir le défunt. Toutes et tous ont un alibi, et avouent connaître peu ou pas Jodoin puisqu’il travaillait de nuit.
Et Antoine Paradis? Il a connu Jodoin à l’époque où ce dernier était plongeur dans un resto et le chef n’a de lui que de bons souvenirs. Cependant, écoutant la rumeur du quartier après deux semaines d’une enquête qui tourne en rond, il croit de son devoir de contacter Marina Duhaime et de lui faire part de ses observations, car il ne peut pas croire qu’on a assassiné un si vaillant garçon.
Inutile de dire que la policière n’a rien à faire des bonnes intentions du chef Paradis, mais, puisque sa mère écoutait autrefois l’émission de télé de ce dernier et qu’elle doit faire avancer ses recherches, elle accepte de le rencontrer. De discours en palabres, l’improbable duo Duhaime-Paradis se forme, sous condition de respecter les règles que le travail de la détective impose.
Ce sont les personnages imaginés par Férandon qui vont lever le voile sur cette triste histoire qui devient de plus en plus drolatique au fur et à mesure que l’auteur précise le contour de leur personnalité. Outre les gens d’« Au bonheur de Noël », il y a le critique Boilard, déjà mentionné; Bill O’Neil, employé de la tabagie Latulippe, « centre névralgique du Vieux-Québec » où Paradis s’informe des racontars et ouï-dire; et l’octogénaire Samuel Gingras, propriétaire de la librairie La Romancerie; Claudia Gervais, directrice des comptes à la caisse pop du quartier; etc.

L’intrigue de Hors saison me semble bien ficelée, sur fond d’humour et d’abus de figures de style, dont les calembours remarqués dans le précédent opus qui sont ici décuplés. Comme le veut le dicton populaire « trop, c’est comme pas assez », surtout qu’ici ce trop est synonyme d’euphémisme. Certes, le ton est léger, la trame cohérente et les personnages, ma foi, des archétypes caricaturaux. Suffit-il de passer un bon moment littéraire pour qu’un roman soit encensé, même s’il souffre de quelques faiblesses dont une logorrhée verbale? Surtout, ne gâchez pas votre plaisir et aventurez-vous dans l’univers déjanté que Max Férandon nous propose sur un air d’été et de vin rosé.

Aucun commentaire:

Publier un commentaire