Olivier de Solminihac et Stéphane Poulin
Les Mûres
Paris, Sarbacane, 2017, s.p., 24,95 $.
Entre rêves et
réalités
Je me demande parfois comment
sont faits les rêves des enfants d’aujourd’hui. Ne sont-ils pas constamment
bombardés par des images en continu, qu’ils ne parviennent pas à distinguer le
vrai du faux, la réalité de l’imaginaire? Leur vie s’appuie-t-elle uniquement
sur de l’un éphémère bancal? Leurs rêves sont-ils faits que de personnages
aussi géants que monstrueux? Il y a pourtant à portée d’eux des livres qui leur
sont destinés et qui racontent des histoires magiques à mille lieues des horreurs
imposées.
Je pense ici au très bel album
dessiné par Stéphane Poulin et écrit par Olivier de Solminihac, Les mûre. Ce joyeux bestiaire a pour
personnages, l’ours Michao, la chevrette Marguerite et le renardeau qui se
charge de raconter le départ de cette petite famille de la maison de campagne
où ils ont séjourné l’été durant.
Certains se souviendront que ces
personnages étaient aussi ceux de Bateau
de fortune (Sarbacane, 2015), un album où « Michao les emmène à la
plage. Qui verra la mer le premier? Sur place, ils s’aperçoivent qu’ils ont
oublié pelles, seaux, ballons, maillots de bain! Que faire, sinon rêver… et
construire un bateau de fortune avec trois fois rien, puis le pousser vers
l’horizon, loin, loin aussi loin que dans leurs rêves les plus fous! Il faut "imaginer",
conclut Michao. »
Dans Les mûres, « Marguerite et le
renardeau jouent avec insouciance, profitant pleinement des derniers instants et
partent avec Michao cueillir un plein bol de mûres, ce qui devient une
aventure, pleine de sensations. À l’heure du départ, alors qu’une cloche
résonne au loin, ces mûres auront la douce saveur des souvenirs de vacances. »
La réalité peut aussi rattraper
les jeunes lectrices et lecteurs quand ce qui inspire l’auteure et
l’illustratrice vient tout droit de faits vécus au temps jadis. C’est ainsi
qu’Emmanuelle Bergeron fait revivre quatre héroïnes qu’illustre Caroline Merola
dans Quatre filles en art (Soulières,
2017). C’est ainsi qu’on rencontre la grande comédienne française Sarah
Bernhardt (1844-1923), la créatrice de mode Gabrielle Coco Chanel (1883-1971),
l’écrivaine Agatha Christie (1890-1976) et la chanteuse québécoise Mary Travers
(1894-1941) dite La Bolduc.
L’auteure et l’illustratrice
continuent ainsi à faire connaître des personnages féminins qui ont marqué
l’Histoire grâce à leur talent remarquable dans des sphères différentes et dans
divers pays. Elles se sont ainsi arrêtées à Cinq
sportives de talent (Marie-Louise Sirois, Myrtle Cook, Sharon et Shirley
Firth, Nadia Comaneci) et à Quatre filles
de génie (Hypathie d’Alexandrie, Marie-Anne Pulse-Lavoisier, Beatrix
Potter, Marie Curie).
Enfin, comment ne pas voir dans Souffler dans la cassette (Leméac, 2017), le premier
roman de Jonathan Bécotte, le parfait mariage entre la fiction et la réalité.
En effet, ce «roman poétique dépeint
l’amitié entre deux garçons du primaire dont les jeux et les aventures formeront les racines des hommes
qu’ils deviendront. Ce livre fait sourire le lecteur parfois de façon attendrie
et parfois avec nostalgie, au point où celui-ci se surprend à vouloir retourner
à l’époque de son enfance, du moins de fouiller parmi ses souvenirs d’alors. C’est
ainsi que le jeune auteur fait passer le narrateur de la naïveté de ses
premiers jours d’école à la boule d’émotions de sa première vraie peine
d’amour.» Comme le disait J. Bécotte à l’animatrice de « Plus on est de
fous, plus on lit! » : « On a une relation forcée avec ses parents,
ses frères et ses sœurs, tandis que son meilleur ami, on le choisit. [...]
C’est le premier élan vers une autre personne qu’un membre de sa famille. Je
pense que c’est pour ça que c’est aussi fort ».
Lire,
c’est rêver les routes à venir, à la mesure de chacun.
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