jeudi 22 mai 2025

Katia Gagnon (dir.)

Devenir journaliste : le métier vu du terrain

Montréal, La Presse, 2025, 368 p., 27,99 $.

Bonne presse, mauvaise presse

La presse écrite sous toutes ses formes fait partie de mon quotidien depuis ma plus tendre enfance. J’ai connu ses heures de gloire alors que les journalistes, toutes catégories confondues, retenaient l’attention de la population jusqu’à être considéré comme le quatrième pouvoir.

« L’expression " quatrième pouvoir " désigne la presse et les médias. Par extension, le quatrième pouvoir regroupe tous les moyens de communication qui peuvent servir de contre-pouvoir face aux trois pouvoirs incarnant l’État (pouvoir exécutif, législatif et judiciaire), en recourant au principe de protection des sources d’information des journalistes. » (Wikipédia, 17 mars 2025)

Il fut un temps où chaque région du Québec avait un hebdomadaire dirigé par le diocèse, cette unité territoriale de l’Église catholique, qui veillait sur les bonnes nouvelles au détriment des événements sur lesquels on mettait le couvercle sur la marmite en ébullition. Il en allait de même pour les principaux partis politiques dont l’influence était distribuée à travers les pages des hebdos.

Il y avait surtout que la presse écrite se présentait sur support papier, lequel a littéralement disparu au cours des dernières décennies. Le Canada français que vous avez entre les mains, comme d’autres hebdos d’Ici média, tient le coup depuis 165 ans, tel le village des fiers Gaulois.

Or, nous sommes actuellement les témoins d’une guerre ouverte contre la presse en général et les journalistes en particulier qu’on accuse de tous les maux. Les salves dirigées vers eux sont incessantes au point où on peut même observer une paranoïa collective à leur endroit.

Devenir journaliste : le métier vu du terrain, un collectif d’auteurs du milieu journalistique sous la direction de Katia Gagnon, arrive à point nommé, car il remet les pendules à l’heure en analysant de façon détaillée la profession de journaliste.

« Les journalistes de La Presse+ vous livrent les secrets du métier dans cet ouvrage indispensable à qui s’intéresse à la couverture de l’actua­lité. Dans un contexte de désinformation et de baisse de confiance du public envers les médias, un livre sur les dessous du journalisme s’imposait. »

« Comment les journalistes s’y prennent-ils pour dénicher des nouvelles exclusives, vali­der leurs informations, capter et conserver notre attention? Comment parviennent-ils à tirer les vers du nez d’un fraudeur? À gagner la confiance de membres du crime organisé? À aborder les proches d’une victime à la suite d’un drame ou à convaincre une personne réticente de leur accor­der une entrevue à visage découvert? » Voilà autant de questions auxquelles dix-sept journalistes apportent des réponses qui allient les aspects théoriques et les dimensions pratiques, en général ou selon leur pratique respective.

Si l’essai s’adresse d’abord aux futurs journalistes, les autrices et auteurs, habitués des communications intelligibles et intelligentes qu’exige la presse écrite généraliste, savent faire œuvre utile, voire pédagogique, pour tous les lectorats.

La première partie de l’ouvrage s’intéresse à sept aspects du travail des journalistes en général; la seconde, à 13 formes de journalisme spécialisé.

Quels sont les aspects du travail journalistique? « La nouvelle, mission de base » porte sur la matière incontournable de l’activité journalistique. S’il faut d’abord la dénicher, il faut retenir que le « scoop » n’est pas toujours évident et qu’il ne fait pas toujours partie de la nouvelle en soi. Le ou la journaliste doit donc être à l’affut des sujets qui peuvent être l’objet d’une vraie nouvelle. Les sources sont nombreuses, allant de la simple observation de l’actualité rapportée par d’autres médias à l’analyse des documents émanant des divers paliers de gouvernement, des divers blogues d’intérêt public ou des divers réseaux sociaux.

Que dire de la loi d’accès à l’information ou du calendrier d’organismes dont les activités concernent la population en général? Il ne faut surtout pas oublier les contacts que les journalistes établissent dans l’exercice de leur travail et qu’ils doivent entretenir positivement, de telles relations difficiles à établir peuvent connaître une fin abrupte pour une question de détail.

La nouvelle identifiée, il faut ensuite s’assurer de sa véracité et vérifier son intérêt public. Rappelons-nous ici qu’un article suivra un parcours avant de nous arriver. Outre le reporter, il y a le photojournaliste, le ou les chefs de division, le réviseur, le pupitreur ("filet de sécurité des journalistes"), le graphiste, le second réviseur, le directeur de l’édition et le contrôle de la qualité.

Qui dit journaliste, dit écriture de la nouvelle. N’oublions pas qu’il s’agit de règles générales, les journalistes spécialisés devant les adapter à leur champ d’activités. Évidemment, le titre d’un article est le signal qui doit attirer l’attention du consommateur d’information sur le sujet qui sera développé. Si le journaliste doit le suggérer, c’est au titreur, la personne qui a une vue d’ensemble des informations contenues dans l’édition et qui devra l’ajuster au besoin.

Le fameux premier paragraphe, pierre d’achoppement de l’article, doit répondre « à la règle de base du journalisme : si un lecteur ne devait lire qu’un seul paragraphe de votre article pour comprendre la nouvelle, ce serait celui-là. » (31) Ce premier paragraphe – chapeau, amorce ou « lead » – doit répondre à « cinq questions en "w" de la langue anglaise : who, what, where, when, why. » (31) Quant à sa forme, elle peut varier, allant de la citation à une énumération en passant par le "human interest", c’est-à-dire le côté plus personnel de la nouvelle qui peut toucher plus directement le lecteur.

Chacune des sept sections de Devenir journaliste traite d’un aspect du travail journalistique et se termine par une réflexion de Jean-Hugues Roy sur le métier. Voyons-les : s’informer est un besoin, le journalisme est un miroir, le journalisme est un service public, le journalisme est une profession, le journalisme est une institution, le journalisme est un dialogue et le journalisme est un bien public.

Outre l’abc de la nouvelle et de sa diffusion écrite, le guide s’intéresse à d’autres outils dont dispose le journaliste dans l’exercice de sa profession. Il y a ainsi l’entrevue comme colonne vertébrale du reportage; les chiffres dont on précise l’utilisation; le "feature" (« n’importe quel texte court, moyen ou encore très long, qui n’est pas collé sur l’actualité chaude, qui n’entre pas dans la catégorie "nouvelle". »), le talent de conteur du journaliste; le portrait ou l’art de peindre avec les mots; l’enquête, champ de mines du reporter; le journaliste et la loi.

La seconde partie de Devenir journaliste : le métier vu du terrain s’intéresse aux différents genres journalistiques. Ce sont : la couverture des faits divers; les affaires policières et criminelles; le journalisme du "beat" ou de l’actualité quotidienne dans différents domaines d’intérêt général; le reportage à l’étranger; le journalisme économique; le journalisme politique; le journalisme scientifique; le journalisme sportif; le journalisme culturel; le photojournalisme; le journalisme constructif qui peut affecter directement la population; le journalisme d’opinion.

Avec l’arrivée des informations en continu, la répétition des informations est inévitable. Cependant, cela n’enlève rien à la rigueur professionnelle que les journalistes doivent avoir allant jusqu’à corriger une information qui s’avère fausse ou mal interprétée. Que dire des réseaux sociaux ou des blogues, sinon que leur sérieux dépend de qui ils relèvent. Lorsqu’ils sont le canal de diffusion d’informations d’un individu ou d’un groupe d’opinion, il faut être prudent face à leur contenu.

Devenir journaliste : le métier vu du terrain mérite toute notre attention, car il explique noir sur blanc en quoi consiste le travail du journaliste, généraliste ou spécialisé, et les règles qui régissent son travail, de la cueillette des informations à la rédaction d’un article, du photojournalisme à la parution ou la diffusion. Chez nous, les membres de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, la FPJQ, sont soumis à un code déontologique qui est disponible sur le site de l’organisme (https://www.fpjq.org/fr/guide-de-deontologie) et que nous pouvons consulter.

Chose certaine, les journalistes professionnels occupent toujours une place importante dans notre société et s’il faut rester attentif à leurs propos, il faut aussi nous assurer du sérieux de leur travail, notamment à prenant connaissance d’informations croisées entre différents médias.

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